04.05.2021

Les jeunes et l’épargne en période de crise sanitaire

Sondage réalisé par l’IFOP pour le Cercle de l’Épargne - novembre 2020

Depuis le début de la crise sanitaire, les ménages français auraient épargné plus de 100 milliards d’euros de plus qu’en temps normal. 70 % de cette épargne aurait été constituée selon le Conseil d’Analyse Économique par les 20 % les plus riches.

 

Les plus de 55 ans seraient les premiers pourvoyeurs de cette épargne. De l’autre côté, les jeunes auraient subi d’importantes pertes de revenus du fait de la disparition de nombreux emplois à temps partiel. Cette vision est loin d’être fausse même si elle est un peu réductrice. En effet, les jeunes épargnent également depuis le mois de mars 2020, la preuve étant apportée par la remontée, après dix ans de baisse, de l’encours du Livret Jeune. Les moins de 35 ans adoptent des comportements qui diffèrent de ceux des aînés en matière d’épargne avec une ouverture plus importante aux risques. Adeptes du e-commerce, ils sont séduits par l’épargne en ligne. 

 

Selon le sondage réalisé par l’IFOP pour le Cercle de l’Épargne, présenté le 18 novembre 2020, contrairement à certaines affirmations, les 18-24 ans sont les plus nombreux (39 %) à déclarer avoir épargné plus que d’habitude. Ils précèdent les 35-49 ans et bien plus encore les 65 ans ou les jeunes actifs. Ce résultat est en lien avec le fait que de nombreux étudiants (majoritaires au sein de cette classe d’âge) ont réalisé des économies en retournant chez leurs parents du fait la fermeture des universités et des écoles, en particulier lors du premier confinement. 

 

L’effort d’épargne accru de cette classe d’âge s’illustre notamment par la progression de la collecte du Livret Jeune entre janvier et mai 2020 (près de 300 millions d’euros de plus sur l’intervalle). Néanmoins, même si les jeunes ont épargné, ce sont les plus de 55 ans qui ont généré les flux les plus importants depuis un an. Face à la question des sondeurs, ces derniers ont opté pour la prudence de peur d’être catalogués comme des nantis en période de crise. Les jeunes actifs sont ceux qui indiquent le plus avoir « moins épargné que d’habitude ». Ce résultat est lié au fait qu’ils ont été les plus touchés par la réduction du nombre de CDD, de missions d’intérim ou d’emplois à temps partiel. 

Epargne au cours des derniers mois

  Les intentions d'épargne

Interrogés fin 2020 sur les intentions concernant l’épargne ou l’argent mis de côté depuis le début de la crise du coronavirus, les Français pensent, dans leur grande majorité, conserver ou renforcer leur épargne dans les prochains mois, traduisant ainsi leur inquiétude vis-à-vis de la situation sanitaire et économique. 44 % des 25-34 ans pensent conserver l’épargne constituée depuis le début de la crise sanitaire pour faire face à un imprévu, soit presque autant que les 65 ans et plus (45 %). Les jeunes de 18 à 24 ans sont plus disposés à consommer en ne conservant pas cette épargne. 

Les intentions d'épargne - graphique

  Epargne sur compte courant privilégié à 57 %  

Selon une l’enquête du Cercle de l’Épargne, un Français sur deux a déclaré avoir laissé sur son compte courant tout ou partie de l’épargne réalisée depuis le début de la pandémie. Ils sont presque autant à avoir fait le choix de l’épargne de court terme. L’assurance vie et les actions arrivent bien après avec respectivement 11 % et 8 % des citations.


Le choix du compte courant a été privilégié par 57 % des 65 ans et plus. Les jeunes de moins de 35 ans ne sont que 46 % à avoir opté pour cette solution. Ils ont géré de manière plus active leur épargne que la moyenne de la population. 

Compte courant privilégié par 57 %  - Graphique

  Epargne à court terme, valeur refuge en temps de crise

Contexte de crise oblige, l’épargne à court terme a ainsi joué pleinement son rôle de valeur refuge depuis le début de la crise sanitaire auprès de l’ensemble des Français, quel que soit leur âge. Ainsi près d’un Français sur deux (49 %) déclare avoir placé de l’argent dans un produit d’épargne court terme type Livret A pendant la crise quand ils sont 45 % parmi les 18-24 ans, 59 % parmi les 25-34 ans et 46 % chez les 65 ans et plus. Ceux qui rentrent dans le monde du travail et ceux qui sont dans la tranche d’âge qui précède la retraite (50-64 ans) sont ceux qui ont le plus misé sur l’épargne court terme. Un choix qui tient sans doute à la crainte accrue d’être directement impacté par la crise. 

 

Les jeunes de 18 à 24 ans estiment à 56 % que le Livret A est intéressant, contre 29 % des Français. Le taux de détention de ce produit est en effet de 87 % chez les moins de 30 ans, loin devant l’épargne-logement (36,2 %) et l’assurance vie (26,3 %) qui occupent, en 2018, respectivement la deuxième et la troisième place parmi les différents actifs recensés par l’INSEE dans son Enquête Histoire de vie et Patrimoine.

 

Le score de l’épargne court terme dans l’enquête Cercle de l’Épargne/Amphitéa diminue avec l’âge jusqu’à 64 ans avant de revenir à un niveau comparable à celui de la moyenne des Français. Si avec l’âge, les ménages peuvent diversifier leur épargne et privilégier d’autres placements, en revanche le passage à la retraite pousse généralement à sécuriser leur épargne ce qui explique ce petit sursaut du Livret A. 

Epargne à court terme

  Le rapport aux actions se modifie

Le rapport aux actions se modifie depuis quelques années. Les stigmates des crises précédentes s’estompent. Le nombre de détenteurs de PEA est en hausse depuis 2017 tout comme la part d’unités de compte au sein des contrats d’assurance vie et dans les plans d’épargne retraite. Durant le premier confinement, 150 000 épargnants ont acquis, pour la première fois, des actions profitant de la baisse des cours.

 

Sur l’ensemble de l’année 2020, l’Autorité des Marchés Financiers a dénombré plus de 400 000 nouveaux actionnaires confirmant le succès rencontré par la privatisation de La Française des Jeux en 2019, 450 000 ménages avaient alors acquis des actions. 

 

Selon l’enquête du Cercle de l’Épargne de septembre 2020, 37 % des sondés estimaient que les actions étaient un placement intéressant contre 29 % en 2016. Le succès des actions est encore plus marqué chez les jeunes sondés. Près de 6 jeunes sur 10 âgés de 18 à 24 ans (58 %) considèrent que le placement « actions » est intéressant et 44 % des 25-34 ans pensent de même. Les jeunes de moins de 35 ans gèrent de plus en plus leur épargne en ligne. Or, les actionnaires particuliers en ligne représenteraient 14 % des intervenants personnes physiques sur les marchés actions du SBF 120 en 2018 et 2019, selon les l’AMF. Ils sont « beaucoup plus jeunes que les investisseurs habituels, entre 10 et 15 ans de moins en moyenne sur l’ensemble des établissements ». Internautes agiles, ils recourent davantage aux sites en ligne pour réaliser leurs investissements que leurs aînés. Par ailleurs, trop jeunes pour avoir connu les désillusions des précédentes chutes du marché actions, ils font davantage preuve d’opportunisme en achetant à la baisse afin de réaliser d’intéressantes plus-values.

Les actions, un placement intéressant - Graphique

Cet intérêt accru pour les actions est également visible dans les choix de placements réalisés par les plus jeunes depuis le début de la pandémie. De fait, 21 % des 18-25 ans ont indiqué dans l’enquête de septembre dernier avoir placé une partie de leur « épargne Covid » dans le marché actions contre 8 % de l’ensemble des sondés. 

Part des sondés ayant investi en actions

  Les actions séduisent moins les séniors

À l’inverse, les actions séduisent moins les séniors. 29 % des 65 ans et plus jugent ce placement intéressant et 2 % déclarent avoir placé une partie de leur épargne Covid dans ce support. Le souvenir des krachs passés explique certainement ce rapport aux actions. Ils ont, en outre, été les grands bénéficiaires du cycle de taux élevés qui s’est traduit par l’essor des fonds euros de l’assurance vie. 


Si le marché actions rencontre un franc succès chez les plus jeunes, ces derniers demeurent limités par les moyens qu’ils peuvent allouer à leur épargne. Sans surprise, la possession de valeurs mobilières demeure, jusqu’en 2018 (dernières données disponibles), prépondérante chez leurs aînés qui possèdent, par effet d’accumulation et de valorisation, une grande partie du patrimoine des ménages. De fait, le taux de détention de valeurs mobilières était de 17 % en 2018 pour les 60 ans et plus contre seulement 9,2 % pour les moins de 30 ans. 

 

Rapporté aux actifs accumulés, qui passent de 38 500 euros de patrimoine net moyen pour les ménages dont la personne de référence a moins de 30 ans à 315 200 euros pour les sexagénaires, le poids des valeurs mobilières est plus important chez les séniors (plus de 4 % pour les 60 ans et plus contre 0,5 % pour les moins de 30 ans).

  Assurance vie, placement toujours attractif

En 2020, selon le baromètre IFOP/ Cercle de l’Épargne, 48 % des Français considèrent que l’assurance vie demeure un placement attractif. Elle arrive toujours en tête des placements financiers privilégiés des Français. La montée en puissance du plan d’épargne retraite, commercialisé depuis le 1er octobre 2019, met un peu de concurrence sur le marché de l’épargne longue et pourrait faire un peu bouger les lignes.

L'assurance vie, un placement intéressant ?

Si les séniors avec la baisse du rendement des fonds euros sont moins nombreux à estimer l’assurance vie comme un produit intéressant, l’opinion des jeunes de moins de 35 ans reste stable. Ils sont plus enclins à acquérir des unités de compte et subissent donc moins la baisse des rendements des fonds euros. les jeunes approuvent la souplesse qu’offre l’assurance vie pour se constituer un patrimoine. 

Intérêt de l'assurance vie en fonction de l'âge

  Le monde de l'épargne, une révolution en marche

Les jeunes de moins de 35 ans, à la différence de leurs aînés, entendent parler de crise depuis leur naissance et de problèmes de financement des retraites. Depuis plus de dix ans, ils constatent la baisse des taux d’intérêt. Ils ne sont pas insensibles à l’essor des cryptomonnaies. Ils considèrent que le système de retraite ne pourra pas financer leur pension. Ce jugement est certes exagéré mais il traduit une véritable inquiétude des jeunes sur le sujet. Ils considèrent, plus que les générations précédentes, que le financement de la retraite passera par un système associant capitalisation et répartition.


Ils sont assez sceptiques sur les formules collectives et préfèrent pouvoir gérer leur plan d’épargne retraite. La gestion en ligne est pour eux une évidence tout comme la possibilité d’accéder à de nombreux supports. Une révolution est en marche au sein du monde de l’épargne. La génération Y a, en effet, atteint la quarantaine. 

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