04.10.2021

Retraite, ou en sont nos partenaires ?

La retraite hors de nos frontières

Tous les pays occidentaux sont confrontés à l’épineuse question du vieillissement et du financement des pensions. Au moment où en France, les pouvoirs publics hésitent à reprendre la discussion du projet visant à instituer un système universel de retraite, il n’est pas inutile de faire un petit tour du monde des systèmes de retraites.

 

La retraite est dans la grande majorité des pays de l’OCDE le premier poste de dépenses de la protection sociale. Si pour des raisons historiques, sociologiques, culturelles, les systèmes diffèrent d’un pays à un autre, les points de ressemblance sont importants d’autant plus qu’une convergence est en marche. 

  Le financement des retraites diffère d’un pays à un autre

En 2017, les prestations publiques et privées couvrant le risque vieillesse représentaient 16,7 % du PIB en Italie, 13,9 % du PIB en France. L’Italie et la France sont les deux pays au sein de l’OCDE qui consacrent la part la plus importante de leur création de richesse à la retraite. Les États-Unis (12,4 %), le Japon (11,9 %), la Belgique (11,6 %) et l'Espagne (11,2 %), sont proches de la moyenne Plusieurs pays consacrent une part moins élevée de leur PIB aux dépenses de retraite. C'est le cas de l'Allemagne (11,0 %), du Royaume-Uni (10,8 %), de la Suède (10,3 %), du Canada (10,3 %) et des Pays-Bas (9,8 %). 

 

 

En matière de couverture retraite, trois groupes de pays peuvent être distingués

 

Le premier concerne des pays comme le Canada, les Pays-Bas et le Royaume-Uni où la protection sociale répond à une logique beveridgienne. L’effort contributif n’est pas pris en compte et la pension est forfaitaire à travers un critère de résidence (Pays-Bas) ou de durée d’assurance (Royaume-Uni) sans référence aux rémunérations professionnelles passées. Au Canada, s’ajoute néanmoins à la partie forfaitaire une partie calculée en fonction de la durée de cotisation et des rémunérations (effort contributif indirect), mais avec une assiette et des taux de liquidation peu élevés. Dans le modèle beveridgien, les taux de remplacement bruts offerts par le système public sont relativement bas. En contrepartie, afin d’assurer une continuité de niveau de vie entre vie active et période de retraite, les assurés doivent recourir à l’épargne privée. Ces pays se caractérisent par un vieillissement démographique relativement moins marqué que dans les autres pays étudiés, notamment parce que leur espérance de vie à 65 ans y est plus faible. En conséquence, la taille du système public y est relativement faible : la part des dépenses publiques de retraite dans le PIB avoisine les 5 % du PIB. Les fonds privés sont largement développés en représentant environ 50 % des dépenses totales de retraite. Comme la pension ne dépend pas des revenus antérieurs d’activité, le système public a tendance à être redistributif dans ces pays. 

 

Dans le deuxième groupe de pays, l’effort contributif est pris en compte et la pension est fonction des revenus d’activité. Se trouvent dans ce groupe des pays comme l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, la France ou l’Italie. La protection sociale, d’inspiration bismarckienne, s’inscrit alors dans une logique assurantielle. L’effort contributif peut être traduit en points comme en Allemagne et en Italie ou comme en France, pour les régimes complémentaires. Dans ce système, les pensions peuvent être plafonnées. L’Italie, l’Espagne et la France ont ainsi institué des plafonds relativement élevés. Le taux de remplacement brut pour une carrière complète au salaire moyen est de ce fait important (proche de 80 % en Italie). Les pays à tendance bismarckienne se caractérisent par le poids important des retraites publiques à l’exception de l’Allemagne. Le vieillissement démographique de ces pays est également plus marqué, en moyenne, que celui constaté dans les autres pays étudiés par l’OCDE. Ces systèmes sont contributifs, au sens où les pensions sont proportionnelles aux revenus (Italie, Espagne et Allemagne), ce qui induit un taux de remplacement constant au moins jusqu’au plafond (France). Les redistributions y sont a priori plus faibles que dans les pays d’inspiration beveridgienne. Toutefois, l’existence de plafonds et le développement de nombreux mécanismes d’assistance  ces dernières décennies ont rapproché les deux systèmes. Le système public de retraite belge avec un plancher et un plafond de pension assez proches ressemble de fait à un système forfaitaire. 

 

Dans le troisième et dernier groupe, le système de retraite est dual tout à la fois de nature beveridgienne et bismarckienne. Appartiennent à ce groupe le Japon, les États-Unis et la Suède. L’effort contributif est pris en compte de manière directe en Suède puisque les pensions sont calculées de façon à représenter l’équivalent actuariel des cotisations. Cependant, l’existence d’une pension garantie minimale et d’un plafond relativement faible limite le caractère contributif Comme les taux de cotisation sont relativement peu élevés, les taux de remplacement offerts par le système public sont faibles, en moyenne 42 % jusqu’au salaire moyen, mais dégressifs ensuite en raison du plafond proche du salaire moyen. Aux États-Unis, l’effort contributif est pris en compte de façon indirecte via une référence à la durée de cotisation et aux rémunérations d’activité. Le système introduit cependant une redistribution importante à travers les règles de calcul de la pension. Trois taux de liquidation existent correspondant à trois tranches de revenu, la tranche la plus élevée supportant le taux de liquidation le plus faible. Les taux de remplacement bruts offerts par le système public varient ainsi de 50 % pour une carrière complète à 0,5 fois le salaire moyen à 33 % pour une carrière à 1,5 fois le salaire moyen. Le système nippon est proche du système canadien, mais la partie contributive y est plus développée avec une assiette et des taux de cotisation dans la moyenne des pays étudiés, ce qui peut notamment s’expliquer par la nécessité de financer un vieillissement important. Dans ces deux derniers pays, la proportion de retraités parmi les personnes âgées de 65 ans et plus est plus faible que la moyenne en raison d’un âge de départ à la retraite relativement élevé. Au Japon, aux États-Unis et au Canada, la taille du système public pour les retraites est faible (entre 7 % et 9 % du PIB) et les fonds privés y sont également développés (entre 20 % et 40 % du total des dépenses). 
 

La France en tête, pour le moment, pour le niveau de vie des retraités

Le niveau de vie des 65 ans et plus représente entre 80 % et 105 % de celui de l’ensemble de la population et leur taux de pauvreté est variable d’un pays à l’autre. Le niveau de vie des retraités et le taux de pauvreté sont indépendants du système de retraite.

En moyenne dans l’OCDE, le niveau de vie des retraités correspond à 87,4 % de celui de l'ensemble de la population. La France est le pays où le niveau de vie relatif le plus élevé avec un ratio supérieur à 103,2 %. Le niveau de vie est assez proche de la moyenne de la population au Canada et aux États-Unis. Il est en revanche nettement inférieur en Belgique (79,7 %). En Belgique, en France, en Italie, en Espagne et en Allemagne, pays d’inspiration bismarckienne, plus de 70 % des revenus totaux des personnes âgées de 65 ans et plus sont issus des transferts publics. Le taux de pauvreté (correspondant au seuil de 50 % du niveau de vie médian) des plus de 65 ans y est relativement faible, proche de celui de l’ensemble de la population (Allemagne) ou inférieur (Espagne, France). Les inégalités de revenus des 65 ans et plus ne sont ainsi pas plus marquées que pour l’ensemble de la population.

 

Dans les pays d’inspiration beveridgienne, les transferts publics représentent entre 35 % et 45 % des revenus des ménages retraités. Cette faiblesse est compensée par la part des pensions professionnelles en capitalisation (Pays-Bas, Royaume-Uni) ou des revenus du capital liés aux pensions facultatives individuelles (Canada), tandis qu’au Japon et aux États-Unis, le niveau de vie des seniors est également alimenté par une part élevée de revenus du travail. Dans ces pays, les taux de pauvreté des plus de 65 ans sont élevés. Il dépasse 15 % aux États-Unis, au Japon et au Royaume-Uni quand en France, il s’élève à 8 %.

Quel que soit le mode de financement des pensions, tous les gouvernements sont contraints de réaliser des arbitrages entre actifs et inactifs surtout en période de faible croissance. L’augmentation rapide du nombre de retraités qui s’accompagne d’une stabilisation voire d’une décrue de la population active provoque un transfert de charges intergénérationnel d’autant plus sensible que la création de richesses est limitée.

 

Pour éviter une augmentation du coût du travail, les options sont assez simples, le relèvement du taux d’emploi, le report de l’âge de départ à la retraite, la diminution des pensions en jouant sur l’indexation ou l’augmentation des gains de productivité. Les différentes solutions ne sont pas exclusives les unes des autres. Le report de l’âge de départ à la retraite peut générer des surcoûts sociaux en matière de dépenses de prévoyance ou d’allocation chômage. La baisse du pouvoir d’achat des retraités est évidemment difficile à admettre surtout au vu de la modestie d’un grand nombre de pensions. L’obtention de gains de productivité est évidemment hautement souhaitée mais dépend de facteurs complexes et inconnus pour un certain nombre d’entre eux. 

 

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