01.10.2018

Démocratisons l’accès à l’épargne retraite !

Tribune dans le Cercle Les Echos - rubrique Opinion

Le projet de loi Pacte actuellement examiné à l’Assemblée nationale vise notamment à développer l’épargne retraite en renforçant la cohérence et l’attractivité des produits qui lui sont dédiés. Malheureusement, il ne prévoit pas de mesure encourageant un accès au plus grand nombre.


Développer l'épargne retraite est assurément une nécessité. L'allongement de l'espérance de vie a profondément modifié la façon dont les Français conçoivent et vivent cette période de leur existence. C'est un tiers de vie dont chacun souhaite profiter pleinement, en préservant le plus longtemps possible sa santé, son autonomie, sa liberté d'être et d'agir. Il faut pour cela avant tout pouvoir compter sur un régime de retraite par répartition transparent et de haut niveau. Il est aussi normal et souhaitable que les Français épargnent afin d'avoir la possibilité, le temps de la retraite venue, de jouir sereinement du temps libéré, de mener leurs projets, mais aussi de se protéger des risques liés au grand âge et d'en préserver leur entourage.

 

 

Encourager l'épargne-retraite par des mesures fiscales incitatives, justes et efficacesCependant, se projeter sur une longue durée est très complexe, aussi les choix en matière d'épargne se révèlent trop souvent peu adaptés aux enjeux réels. Les épargnants modestes en particulier privilégient la disponibilité du capital, et de fait, des produits insuffisamment rémunérateurs qui ne protègent pas sur le long terme. En général, les personnes se préoccupent de leur niveau de vie à la retraite trop tardivement pour constituer une épargne suffisante au regard de leurs besoins. C'est pourquoi, au-delà de l'encadrement réglementaire, il est du rôle de l'État d'inciter à la souscription des contrats d'épargne retraite, notamment au moyen d'une fiscalité encourageante.

 

Encore faut-il que le système d'incitation mis en place soit juste dans ses principes et efficace dans ses résultats. Force est de constater que le mécanisme de déduction fiscale aujourd'hui en vigueur ne l'est pas. Plus les revenus et le taux d'imposition sont élevés, plus l'incitation fiscale est forte. A contrario, elle est nulle pour les ménages non imposables sur le revenu, soit près d'un sur deux. La population qui en bénéficie est ainsi principalement composée de contribuables aisés, majoritairement âgés de plus de 50 ans, alors qu'il serait nécessaire de favoriser la constitution d'une épargne-retraite plus précoce, plus régulière et plus large.

 

Favoriser la constitution d'un capital retraite au plus tôt dans la vie activePour démocratiser réellement l'épargne retraite, le gouvernement pourrait recourir au mécanisme bien connu du crédit d'impôt. Une autre solution a été mise en place en Allemagne (plans Riester) qui prévoit que les épargnants bénéficient soit d'une déduction fiscale, soit d'une subvention publique forfaitaire, le dispositif le plus avantageux étant systématiquement appliqué. Une prime unique a également été créée pour toute personne souscrivant un contrat à l'âge de 25 ans, ce qui s'avère particulièrement pertinent pour inciter à se préoccuper de cette question au plus tôt dans la vie active. Comme l'a montré l'expérience allemande, ce système d'abondement peut être un puissant catalyseur pour la constitution progressive d'une épargne-retraite par une tranche plus importante et plus jeune de la population.

 

Privilégier une sortie en rente pour vivre une retraite sereineEnfin, il faut rappeler qu'une épargne retraite est souscrite pour combler durablement la perte de revenus à la cessation d'activité et qu'elle constitue en cela un acte de prévoyance. Il est donc essentiel que les épargnants soient très nettement incités fiscalement à privilégier la rente à la récupération de leur capital. Alors que la rente garantit un complément de revenu jusqu'au terme de la vie, le danger d'une gestion inadaptée ou d'une utilisation trop dispendieuse du capital fait peser sur l'individu, mais aussi sur la société, un risque accru de pauvreté au grand âge.

 

La loi Pacte renvoie ces questions aux discussions qui auront lieu dans le cadre de la loi de finances. Il est pourtant urgent de mener conjointement cette réflexion afin que le développement de l'épargne retraite puisse réellement bénéficier au plus grand nombre.

 

Eric Jeanneau, Président de l'Union Mutualiste Retraite et Denis Lefebvre, président de PRÉFON

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