Protection Sociale
Plus du tiers du PIB pour la protection sociale
La France est le pays de l’Union européenne dont la part de richesse nationale (34 % du PIB) consacrée aux prestations sociales et à la lutte contre la pauvreté est la plus élevée.
Ces prestations donnent lieu à un débat sur leur efficience qui s’est engagé après les propos de cet été du Président de la république.
Permettent-elles de réduire la pauvreté et surtout donnent-elles les moyens aux bénéficiaires d’améliorer durablement leur situation ?
En 2015, selon l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du Ministère du Travail, 40 % des personnes en France métropolitaine ont un niveau de vie annuel inférieur à 18 145 euros, soit 1 512 euros par mois, selon l’enquête Revenus fiscaux et sociaux de l’INSEE. Parmi ces personnes modestes, un peu plus d’un tiers sont pauvres monétairement, leur niveau de vie étant inférieur à 60 % du niveau de vie médian, soit 1 015 euros par mois en 2015.
Les personnes modestes sont en moyenne plus jeunes et vivent davantage dans une famille monoparentale, une famille nombreuse (au moins trois enfants) ou seules. En 2015, 43 % des personnes modestes ont moins de 30 ans contre 31 % pour le reste de la population, 30 % ont moins de 20 ans contre 21 % pour le reste de la population. Parmi les personnes modestes, la part des jeunes est d’autant plus élevée que les revenus sont faibles.
Plus d’un tiers des personnes modestes (35 %) vivent dans une famille monoparentale ou dans une famille nombreuse, contre 14 % pour le reste de la population. Cette surreprésentation augmente avec la pauvreté : 44 % des personnes pauvres vivent dans une famille monoparentale ou nombreuse, contre 30 % des personnes modestes non pauvres. Les personnes seules sont également surreprésentées parmi les personnes modestes. 19 % des personnes modestes sont seules, contre 14 % parmi le reste de la population.
Les chômeurs et les inactifs non retraités âgés de 18 ans ou plus sont aussi plus présents parmi les personnes modestes (23 %) que parmi le reste de la population. Par ailleurs, les personnes en situation de handicap sont également surreprésentées parmi les personnes modestes (19 % contre 14 % pour le reste de la population).
En revanche, les retraités et surtout les personnes en emploi sont moins présentes parmi les personnes modestes (respectivement 19 % et 29 %) que dans le reste de la population (24 % et 48 %).
Les habitants des grands pôles urbains sont moins concernés par la pauvreté que les personnes vivant en milieu rural. Seulement 16 % des ménages modestes vivent au sein des grandes agglomérations contre une moyenne nationale de 23 %.
Les minima sociaux bénéficient aux 20 % des résidents les plus modestes
En 2015, 80 % de la masse totale des minima sociaux et 75 % de la masse des allocations logement sont distribués aux 20 % des personnes les plus modestes. La CMU-C et le RSA ciblent majoritairement les personnes à faibles revenus. En revanche, la Prime Pour l’Emploi (PPE) a un public, par nature, plus large. En 2015, 8 % de la masse totale de la prime pour l’emploi ont été versés aux 10 % de la population ayant les revenus initiaux par unité de consommation les plus faibles (premier décile), alors que 54 % ont été distribués aux ménages qui se situent dans les trois déciles suivants.
Si les plafonds d’attribution des allocations familiales sont situés au-dessus des minimas sociaux, ces prestations sont de plus en plus versées aux ménages à faible niveau de vie en raison de la surreprésentation des familles avec enfants, notamment des familles nombreuses et des familles monoparentales. 56 % des prestations familiales sont allouées aux 30 % de la population ayant les niveaux de vie les plus faibles avant redistribution.
Les prestations sociales représentent 40 % des revenus des Français les plus modestes
Les prestations sociales non contributives et la prime pour l’emploi représentent 41 % du revenu disponible des ménages modestes. Ce taux est de 48 % pour les Français dont le revenu disponible figure dans le 1er décile et 24 % pour ceux du 2e décile.
Les prestations familiales représentent ainsi 40 % du montant de l’ensemble des prestations sociales versées (y compris la PPE) devant les minima sociaux et les allocations logement qui comptent respectivement pour 28 % et 26 % du total. En 2015, la proportion de personnes situées sous le seuil de pauvreté, qui correspond au taux de pauvreté, est ainsi réduite de 8,1 points, une fois l’ensemble des prestations sociales non contributives, la PPE et la fiscalité directe prises en compte.
En définitif, en 2015, 14,2 % de la population métropolitaine vit sous le seuil de pauvreté, soit 8,9 millions de personnes. L’intensité de la pauvreté (l’écart entre le seuil de pauvreté et le niveau de vie médian des personnes pauvres, exprimé en proportion du seuil de pauvreté) diminue de 18,5 points sous l’effet de la redistribution, pour atteindre 19,6 %. Ce sont les prestations familiales (-2,4 points), les aides au logement (-2,1 points) et les minima sociaux (-2,0 points) qui réduisent le plus le taux de pauvreté. Les effets du RSA activité et de la prime pour l’emploi sur le taux de pauvreté et son intensité en 2015 restent en revanche limités (entre -0,1 et -0,7 point).
Les prestations sociales réduisent les inégalités de niveau de vie entre les plus aisés et les plus pauvres
En 2015, en France métropolitaine, le rapport entre le 9e décile de niveau de vie (plancher des 10 % les plus riches) et le premier décile (plafond des 10 % les plus pauvres) est de 6,1 avant redistribution. La redistribution permet de réduire ce ratio de 2,7 points pour atteindre 3,57, comme en 2014 et 2013. Cela signifie qu’après redistribution, le plancher du niveau de vie des 10 % les plus aisés est 3,5 fois supérieur au plafond de niveau de vie des 10 % les plus pauvres.
Un deuxième indicateur d’inégalités de niveau de vie entre les plus pauvres et les plus aisés est le rapport établi entre la masse des niveaux de vie détenue par les 20 % les plus aisés et celle détenue par les 20 % les plus modestes. Ce rapport diminue de 4,1 points avec la redistribution pour atteindre 4,4, comme en 2014. Cela signifie qu’après redistribution, la masse des niveaux de vie des 20 % les plus aisés est 4,4 fois plus élevée que celle des 20 % les plus pauvres, alors qu’elle était 8,4 fois supérieure avant redistribution.
Les statistiques sont moins flatteuses concernant l’évolution des bénéficiaires des prestations sociales et en particulier des minima sociaux. Selon une étude de l’OCDE (2018), les personnes du quintile inférieur de revenu (les 20 % des personnes ayant les revenus les plus faibles) ont peu de chance de s'élever en termes de revenus. 64 % des personnes de ce groupe n’évolueront pas durant leur carrière. L’ascension sociale dépend avant tout du niveau d’éducation.
La France reste un des pays où le déterminisme scolaire est le plus élevé. Les enfants des familles modestes ont une probabilité faible (17 %) de poursuivre des études supérieures.
Au mois de septembre, le Président de la république, Emmanuel Macron, a décidé la mise en œuvre d’un nouveau plan « anti-pauvreté » doté de 8 milliards d’euros de crédits sur 4 ans, incluant notamment la refonte des aides sociales pour donner jour à un revenu universel d’activité. Cette refonte qui s’inspire des conclusions du rapport Sirugue de 2016 "Repenser les minima sociaux : vers une couverture socle commune". Ce projet devrait aboutir à une fusion du RSA, des APL et de la prime d'activité. Un projet de loi devrait être présenté dans ce sens d’ici 2020 vraisemblablement précédée d’une période d’expérimentation dans les Départements volontaires, comme ce fut le cas en 2007-2008 pour le RSA.
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